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Transformer des plantes polluées en fertilisant efficace : une innovation de l’ENGEES

Loïc Maurer, enseignant-chercheur à l’ENGEES, contribue à une étude internationale qui révèle comment les plantes utilisées dans les stations d’épuration peuvent être transformées en purins fertilisants tout en éliminant jusqu’à 95 % des polluants organiques. Une avancée qui combine dépollution, valorisation des déchets et solutions durables pour l’agriculture et l’environnement.

Transformer des déchets pollués en fertilisant efficace 

Une étude scientifique récemment publiée dans Nature Communications (1er juillet 2025) met en lumière un procédé innovant de transformation des plantes utilisées dans les stations d’épuration en engrais à la fois efficace et dépollué. Loïc Maurer, enseignant-chercheur ENGEES au laboratoire ICube compte parmi les contributeurs de cette recherche mêlant science, environnement et économie circulaire, en conduisant l’analyse des micropolluants.

Des plantes épuratrices… devenues déchets

Dans les stations d’épuration en milieu rural, des plantes comme le roseau sont régulièrement utilisées pour assainir les eaux usées dans un système de filtre planté. Si ce procédé naturel est reconnu pour son efficacité, il génère toutefois des volumes importants de déchets végétaux contaminés. Ils doivent être coupés chaque année et sont difficilement valorisables.

C’est précisément ce paradoxe qu’a voulu résoudre une équipe de chercheurs internationaux, sous la supervision de Dimitri Heintz de l’IPHC de Strasbourg (CNRS), réunissant des chercheurs de l’Université d’Ottawa, de l’IBMP de Strasbourg, Biotransfer et Loïc Maurer pour l’ENGEES. Le projet a été proposé par la communauté de communes Portes de Meuse et l’Agence de l’eau Seine Normandie, engagée dans une gestion durable de ses ressources, utilisant depuis peu l’ortie en plus du roseau dans ses filtres plantés.

Le purin, une solution doublement gagnante

L’équipe a montré que ces plantes, une fois transformées en purin (engrais liquide obtenu par fermentation), voyaient entre 87 et 95 % des polluants organiques persistants éliminés en seulement deux semaines. Parmi les polluants identifiés dans les plantes avant transformation : des phtalates, des HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques), des biocides, des traces pharmaceutiques, mais aussi du fluor et des additifs plastiques.

« Après transformation en purin, une grande partie de ces polluants est complètement éliminée. Ne persistent que de faibles traces de composés connus comme persistent, comme ceux contenant du fluor ou les additifs plastiques », explique Loïc Maurer, qui a mené les analyses de contamination.

Au-delà de la dépollution, les purins obtenus conservent toutes leurs propriétés fertilisantes. Testés en laboratoire, les purins d’ortie et de roseau se sont révélés biostimulants et protecteurs contre certains pathogènes.

« Les purins ont des actions différenciées, par exemple le purin d’ortie stimule plus fortement la croissance des racines, tandis que celui de roseau agit plutôt sur la partie aérienne des plantes », souligne Loïc Maurer.

Un mécanisme microbien au service de la dépollution

Grâce à une approche multidisciplinaire combinant métabolomique et métagénomique, les chercheurs ont pu comprendre les mécanismes en jeu dans cette réduction drastique des polluants. Lors des processus de fermentation pour la production du purin, ils ont identifié un consortium de bactéries et de champignons aux activités cellulolytiques. Ce microcosme décompose les sucres végétaux et facilite l’accès aux micropolluants pour des micro-organismes capables de les dégrader.

Ce mécanisme innovant de biorémédiation microbienne permet de valoriser des déchets jusque-là problématiques, tout en limitant leur impact environnemental.

Une recherche à l’interface des grands enjeux de demain

 « Cette étude était une belle aventure scientifique et humaine, portée par une collectivité très investie et une équipe de chercheurs aux compétences complémentaires », raconte Loïc Maurer.

La communauté de communes Portes de Meuse, déjà innovante en par son système de filtre planté mixte ortie/roseau, a franchi un cap supplémentaire en développant à la suite de ces travaux, une structure de valorisation des sous-produits végétaux issus de sa station d’épuration.

Un dispositif qui pourrait servir de modèle reproductible dans d’autres territoires, en apportant une solution écologique, simple et économiquement viable à la gestion des végétaux contaminés issus des zones humides artificielles et le développement de l’agroforesterie.

Cette étude illustre parfaitement la mission de l’ENGEES et de ses enseignants-chercheurs : concevoir des solutions concrètes, durables et innovantes pour une meilleure gestion de l’eau, des déchets et de l’environnement. Elle fait aussi écho à des thématiques au cœur de ses préoccupations actuelles : transition écologique, économie circulaire, valorisation des déchets, agriculture durable.

En savoir plus :
https://www.nature.com/articles/s41467-025-60918-8

 

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